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L'illusionnisme, une nouvelle classe ?
Le MJ force les joueurs à aller où il l’a décidé à l’avance mais ne le leur dit pas. Ainsi, les joueurs ont l’impression d’être libres de leurs choix.
- Scénario en chapelet (très pratique pour les enquêtes) : chaque scène donne l’information du lieu où les joueurs doivent se rendre et ce qu’ils doivent y faire. Cette approche est souvent liée au scénario que l’on peut réussir ou rater (il était où l’indice dans la grotte ? il fallait quoi pour vaincre le monstre ? le méchant s’enfuit, fin du scénario…).
- Scénario où les joueurs font des choix que le MJ prend en compte.
- Le participationnisme où le MJ force les joueurs à aller où il l’a décidé à l’avance mais il a annoncé aux joueurs sa façon de faire. A noter que si le MJ annonce cela, il ne fait plus d’illusionnisme ensuite.
Ce qui veut dire que lorsque le MJ fait de l’illusionnisme (tout le temps ou juste à un moment clé), il rompt le contrat social. Chose qu’il n’accepterait pas de la part des joueurs. Le MJ triche donc, il trahit les joueurs. Pour le bien de l’histoire dit-on souvent. Mais que perd-il en pratiquant de la sorte ?
La seule illusion, c’est l’illusionnisme
Que va-t-il se passer ?
- Votre enfant va se rebeller. Après tout, vous n’avez pas respecté l’accord, alors pourquoi lui ?
Le deuxième cas mène à des conflits, le joueur est alors qualifié de "chieur". Le premier cas est très majoritaire, les joueurs acceptant implicitement le contrôle du MJ, ils chercheront alors toujours à identifier ce que le MJ a prévu, pour le faire. Je pense même que les joueurs qui connaissent les livres dont vous êtes le héros ou les RPG en jeu vidéo arrivent au jeu de rôles avec cette idée de script établi et de cinématiques imposées. Le participationnisme n’a donc rien de honteux et est accepté par une grande partie des joueurs.
Alors comment s'assurer du bon déroulement de la scène-clé de la partie alors que vous aimez laisser une grande liberté à vos joueurs ? Et bien avec honnêteté, tout simplement. Annoncez au début de la scène que là, vous allez décrire une cinématique nécessaire pour le climax. Et annoncez leur dès le début de la partie qu'un à moment important, vous allez prendre le contrôle de l'histoire pour décrire une cinématique. Cela évitera un sentiment de trahison chez les joueurs et un basculement implicite vers le participationnisme, mettant fin à la créativité que vous voulez créer.
Les fausses questions
"Ca va ?" est ce que j’appelle une fausse question car elle n’attend pas toutes les réponses que l'intitulé devrait permettre.
"que faites-vous ?".
- Si vous êtes prêt en tant que MJ à réagir à la proposition des joueurs, cette question est tout à fait pertinente et garde tout son sens.
Evidemment, si le joueur raconte un truc qui sort du cadre du jeu ou du contrat social, dites-lui simplement que ce n’est pas le bon jeu et demandez-vous si vous avez bien posé les choses au départ (des super-héros doivent secourir les personnes en danger, il n’y a pas de soucoupe volante dans cet univers…).
- Si la question permet un nombre limité de réponses, n’hésitez pas à les rappeler aux joueurs. Plutôt de demander "que faites-vous ?", demandez "traversez-vous le lac avec la barque, contournez-vous le lac par la rive est ou contournez-vous le lac par la rive ouest ?". Ca fait très livre dont vous êtes le héros mais il n’y aura aucune confusion pour les joueurs. De plus, le MJ peut tout à fait laisser la possibilité aux joueurs de soumettre leurs idées. Ainsi, un joueur peut demander s’il est possible de ne partir que le lendemain matin, d’aller chercher du matériel au village ou de se renseigner au village sur les dangers des trois options. Le MJ est libre de refuser "vous n’avez pas assez de temps si vous voulez éviter l’invocation du démon" ou d’accepter avant de réitérer sa question 15 minutes plus tard mais cette fois-ci, les joueurs auront peut-être d’autres éléments pour faire leur choix.
- Si la question ne permet qu’une seule réponse, êtes-vous bien sûr qu’il soit intéressant de la poser ? Je ne peux pas m’empêcher de comparer ces scènes avec un spectacle. Lorsqu’un artiste monte sur scène et demande "vous en voulez encore ?", le public lui est acquis et va répondre "ouuuuiiiiiiiiiii !". Vous imaginez le bide si le public répond "nooooooooon, casse-toi !" ?
- Alors les enfants, il est où le voleur ?
- Làààààààààààààààà !
Mon fils, à 2 ans, a suivi un spectacle de rue. Pourtant, avec l’accent italien, il ne comprenait rien à l’histoire mais comme le public participait souvent, il était à fond. Il disait un petit oui ou un petit non en guettant la réaction des plus grands avant d’hurler la bonne réponse.
Vous demandez la même chose à vos joueurs !
Quand vous décrivez le vieux qui se fait agresser dans la ruelle et que la seule chose attendue des joueurs est qu’ils aillent à lui, ne posez pas la question "que faites-vous ?". Au lieu de ça, continuer votre cinématique en gardant le contrôle de la narration, ce qui veut dire prendre le contrôle des personnages : "vous voyez un vieillard se faire agresser dans une ruelle sombre. Aussitôt, vous vous y engagez pour aller l’aider". Et maintenant, s’ils ont le choix, vous pouvez demander "que faites-vous ?".
"Vous vous engagez pour aller l’aider. Aussitôt les agresseurs déguerpissent tandis que le vieux meurt dans vos bras. Il serre encore une lettre cachetée dans sa main ensanglantée".
Vous devinez que je vous invite aussi à poursuivre la cinématique en disant que les personnages ouvrent la lettre, etc…
Si mon premier argument est un souci d’honnêteté avec les joueurs et éviter à tout prix l’illusionnisme, je souhaite soulever aussi que cette méthode permet de faire gagner du temps et d'éviter des prises de tête entre joueurs. Ainsi, lorsque vous laissez votre groupe cogiter sur le plan d'attaque et qu'une fois qu'ils se sont mis d'accord (s'ils se sont mis d'accord), soit après une bonne heure si le problème est complexe, vous leur balancez un évènement ou un PNJ qui indique la direction à suivre, sans que la discussion précédente n'intervienne d'aucune façon, vous venez peut-être de perdre une heure. Et la prochaine fois, les joueurs ne se casseront pas la tête, ils attendront la révélation du MJ, même s'il n'y en a pas.
L'illusionnisme caché = la flagrante réalité
Mais ce que j'appelle ici l'illusionnisme caché, c'est lorsque le MJ cherche à se voiler la face en utilisant un artifice simple et à priori honnête pour que tout se déroule comme prévu sans devoir tricher.
Cette solution n'est pas à mon sens plus honnête que le simple illusionnisme.